Lourd souvenir …
Ce blog n’avait pas à vocation de devenir un blog politique, mais j’ai de plus en plus de mal à me taire.
Il y a 32 ans, j’étais en vacances avec mes parents. J’avais donc 10 ans.
Sur la route des vacances, nous sommes passés non loin d’Oradour sur Glane. Je pense que beaucoup d’entre vous le connaissent. C’est un village dont les nazis ont exterminé sauvagement la quasi totalité de la population en représailles. 642 personnes, hommes, femmes et enfants, ont été tuées ce 10 juin 1944.
Dans ce village, tout est resté tel que les allemands l’ont laissé ce triste jour. Je me souviens que ma mère m’a dit, ça va être dur, mais tu dois voir ça pour ne jamais oublier. Alors nous sommes rentrés dans ce village et du haut de mes 10 ans, j’ai pris conscience de toute l’horreur de la guerre. Un village vide, détruit, des jouets cassés au sol,, des carcasses de voiture éventrées et rouillées, le bois brûlé et ce silence … je sais ce qu’est un silence de mort depuis.
Rien … il ne restait plus rien. Visite guidée bien sur, je me souviens des commentaires du guide, des détails, de l’horreur que j’ai ressenti en pensant à ces gens massacrés. Surtout en pensant aux enfants qui avaient le même âge que moi.
Même si ça partait d’une bonne intention, je ne sais pas pourquoi mes parents m’ont emmenée faire cette visite. Une chose est sure, ma mère a eu raison, je n’oublierai jamais ce jour.
Alors évidement, quand j’ai entendu la proposition de notre chef d’Etat, de confier à chaque enfant de CM2 la mémoire d’un enfant juif, je n’ai pas pu m’empêcher de penser à cette visite.
Non, je refuse qu’un enfant de 10 ou 11 ans porte le souvenir d’une telle catastrophe.
Je refuse qu’un enfant ressente ce que j’ai ressenti le jour de la visite d’Oradour, ce sentiment d’injustice et même de culpabilité.
Je refuse qu’un enfant porte le poids d’une mort injuste, je refuse qu’il soit traumatisé pour s’être identifié à un petit enfant juif.
Mais d’où sort-il des idées aussi stupides ?
De plus, pourquoi uniquement les enfants juifs ? Et les petits Arméniens, et les petits Rwandais et les petits vietnamiens et tous les pauvres petits malheureux qui vivent sans leur parent, dehors, livrés aux mafia ou aux trafiquants d’enfants ? Qui ne sont pas encore morts, mais qui ne savent même pas s’ils seront encore vivants demain. Est ce à un enfant de 10 ans de supporter l’horreur du monde ?
A 10 ans, on est encore un enfant et on a le droit à l’insouciance.
Je suis ravie aujourd’hui et rassurée de ne pas être la seule à le penser et que des voix s’élèvent contre un tel projet.